Si vous mettez plusieurs guitaristes dans la pièce ça va faire du bruit. Beaucoup de bruit. Et sans doute que tout le monde va vouloir jouer en même temps que les autres. Et donc faire encore plus de bruit. Sauf si vous faites un de ces événements où 600 mecs jouent la même musique, mais bon ça c’est pas franchement un truc que j’ai envie d’avoir sur album et de me passer tout la journée. Pareils pour les batteurs, les bassistes, les trompettistes, les claviéristes, les saxophonistes et je n’ose parler des contrebassistes. Alors pourquoi je parle de ça ? Hé bien il se trouve qu’il y a un cas de figure où mettre des musiciens ensembles dans une pièce ça donne quelque chose de bien. C’est quand les individus utilisent leurs voix. Bon j’exclue l’opéra de la chose parce que l’opéra m’a toujours fait le même plaisir auditif que l’introduction de verre pilé dans mon tympan mais détail que cela. Et quand on parle d’usage de la voix en groupe, en général soit je pense à une chorale … soit à un bon posse cut de rap. Pour ceux qui ne savent pas, au fond là, prononcez le à l’anglais (possi ceut) avec un accent new-yorkais pour vous mettre dans l’ambiance. Le terme désigne tout bêtement un morceau de groupe où plusieurs rappeurs se partagent le micro, en général avec une certaine émulation vu la pression de groupe que ça amène. Et rien que pour vous une petite sélection de posse cuts que j’aime beaucoup. Oui c’est les deux seuls critères et je le vis bien.
Gamin j’ai adoré Space Jam. Non vraiment. Ça me faisait rire, je trouvais le rythme cool, le concept marrant. Et pis j’étais un gosse donc un rien m’épatait. Et puis le temps est passé, je ne l’ai pas regardé depuis plus de 10 ans je pense. Internet est passé par là, j’ai entendu tout le mal que les gens avaient à en dire, mais j’ai continué de l’aimer parce que je vais pas me laisser emmerder parce qu’internet a décrété ceci ou cela. Et puis un jour, je ne sais plus pourquoi, j’ai jeté un coup d’oeil sur la fiche du film avec un regard d’adulte. Et c’est là que j’ai réalisé que la bande son claquait sa maman. I Believe I Can Fly de R. Kelly a été spécialement composé pour ce film nom de dieu ! Et il y a Hit’em High. Déjà, tout simplement, c’est un très bon morceau en lui même. a part Coolio qui est un peu en dessous comparé aux autres, tout le monde balance un gros couplet, que ce soit Method Man avec son assurance fringante, B-Real et sa voix nasillarde inimitable, LL Cool J (avant qu’il se dise qu’NCIS c’était un bon gagne pain) qui crache du feu et surtout, surtout Busta Rhymes qui déborde de cette énergie furieuse que seul le défunt ODB savait atteindre. Rien que ça c’est un bon argument. Mais on est en 97 et c’est encore plus fou. Coolio a sorti Gangsta’s Paradise (son immense carton), Method Man est entre les deux Tical (et si le second est décevant, le premier est une tuerie intégrale), Busta sortira son deuxième juste après la sortie du film et ravagera le paysage new yorkais, pareil pour B-Real et Cypress Hill qui vont sortir Temple of Boom, un album dont le rap latino américain ne s’est pas encore affranchi. J’ai du mal à trouver un équivalent actuel pour vous dire à quel point il y a de la puissance de l’époque dans ce morceau. Donc écoutez le encore et encore.
On reste dans la même époque mais de l’autre côté des États Unis avec 2Pac. Je pense que je n’ai pas franchement besoin de présenter l’individu. Et si vous ne connaissez vraiment pas, faites quelques recherches, ça musclera vos cerveaux. All Eyez On Me sort en 1996, après que 2Pac soit sorti de taule et enfermé en studio pour pondre des morceaux comme un stakhanoviste et pond rien de moins qu’un double album en 5 mois de boulot (plus tous les morceaux qui finiront sur The 7 Day Theory sorti après sa mort). Parmi les morceaux les plus connus de l’album on citera California Love, How Do U Want It ou Ambition as a Ridaz. Mais j’avais envie de parler de ce morceau là. Parce qu’il y a une petite histoire derrière. Beaucoup lient l’histoire du sieur Shakur à Los Angeles, ce qui est cohérent vu qu’il a quand même sorti un morceau sobrement titré To Live and Die in L.A.. Mais il faut savoir qu’à la base il a grandi à Oakland puis a bougé à San Francisco où il s’est lié à pas mal de monde notamment avec le manitou local Too Short et le grand parrain de tout ça : E-40 (ce mec est encore actif aujourd’hui et sort un double album par an bordel). Et l’amitié restera jusqu’aux années Death Row vu qu’il invitera tout le monde sur le morceau dont je vous parle là. E-40 ramènera son frangin D-Shot avec que leur cousin B-Legit (quand on vous dit que le rap c’est une grande famille …) et Richie Rich qui venait de Valejo. Ce qui donne un morceau assez fascinant vu qu’il est empreint de l’énergie très Los Angeles de 2Pac mais contrebalancé par l’instrumentale et les flows des autres qui sonnent nettement plus Bay Area. Un morceau très cool, à écouter quand il fait beau pour se sentir comme un boss playa homie.
La Coka Nostra c’est l’histoire d’une bande de blancs de 40 ans pas contents avec des bides à la bière et des théories du complot en stock et d’un membre de Limp Bizkit. Dit comme ça ça ressemble vraiment à une très mauvaise blague et/ou à un groupe de merde. Y’a un truc vrai dans cet histoire : ils n’ont jamais réussi à sortir un album à la hauteur de la somme des talents impliqués mais c’est un détail que cela. La Coka Nostra est né du microcosme gravitant autour de Danny Boy, autrefois membre de House of Pain qui était resté à trainer à Los Angeles tandis que tout le monde suivait ses projets. De fil en aiguille il en est venu à se lier à pas mal de monde, tant et si bien que ça lui a donné envie de refaire de la musique. Et c’est ainsi qu’on se retrouve avec Ill Bill de Non Phixion (dont je vous avais déjà parlé), DJ Lethal de Limp Bizkit, ce qui n’est guère surprenant il avait été autrefois dans House of Pain avant, Everlast de … House of Pain, à un moment je soupçonne que Danny Boy était nostalgique de se retrouver avec ses copains, et Slaine, un mec de Boston connu à l’époque pour faire des battle de rap dans la rue qui finissaient en baston pour un oui ou un non, le fait que ce soit un alcoolo patenté n’a pas dû aider. Et au bout de trois ans à enregistrer, oui trois ans parce que Danny Boy insistait pour que tout soit enregistré avec tout le monde au studio, jamais par mail et autres, ils sortent leur premier album. Qui fut pas extraordinaire pour être franc, trop de morceaux chantés et pas assez de rap bien énervé comme les extraits sortis avant le laissaient croire. Mais il y a That’s Coke sur l’album, et ça c’est important. C’est en écoutant ça que je comprends pourquoi avoir tout le monde dans le même studio était important. Tout le morceau est construit sur le fait que chaque membre envoie quatre mesures et passe la main au suivant, chaque fois sur des jeux de mots à base de poudreuse et d’armes à feu. C’est pas Le meilleur morceau de rap du monde, c’est certain, mais la structure et l'énergie font que ça marche du feu de Dieu. Hélas La Coka Nostra perdra deux membres après ce premier album et avec une forme d’énergie qui faisait son charme.