Gerru :
Le terme anglais est “tricky”, j’ai donc choisi de le
traduire en “pas évident”, j’aurais pu mettre “épineux” ou “délicat” mais y’a
une connotation assez négative dans ces deux termes qui aurait biaisé la
question je pense. Je le dis juste pour mieux contextualiser ma réponse.
J’ai un moment qui me vient en tête quand il s’agit de gérer
des choses pas évidentes dans une partie. Le détail amusant est que ce n’était
pas le jeu le problème que de la gestion “autour” de la table. Je sais pas ce
que ça révèle sur moi et ma façon de voir ou de gérer les choses, à vous de me
le dire.
Ce moment fut … croyez-le
ou non, les circonstances de mon premier mastering. J’ai attendu longtemps
avant d’en parler, je pensais faire un long article sur le sujet mais puisque
j’ai l’opportunité là, profitons-en. On est début 2016 (oui encore), fin
février en gros. Ça fait environ deux mois que je regarde Deadlands, j’apprends doucement les règles et j’ai un scénario
rédigé dans ses grandes lignes sans conclusion ni statistiques pour les PNJ.
Dans ma tête j’ai le temps de domestiquer la bestiole quoi. Du coup, toujours
dans une optique d’apprentissage, je propose à Louis de passer me voir pour qu’on regarde un petit peu ça
ensemble. Voilà donc qu’on passe une après-midi chez moi, je lui montre un
petit peu le jeu et ses principes et ça l’emballe grave. Du coup, toujours dans
une optique de test, on décide de faire son personnage. Après quelques
balbutiements ça marche plutôt bien et il repart avec sa fiche en poche et moi
je retourne à mes pénates. C’était un mercredi après-midi je crois. La semaine
continue et je n’y pense plus, c’est pas la première fois qu’on évoque un jeu,
qu’on fait des fiches et qu’elles prennent la poussière. Arrive vendredi soir.
Je rentre du travail et me colle devant mon ordi. Je lance Skype où m’attendent
plusieurs messages de Louis qu’on
peut résumer à “Bon bah j’ai cherché un
groupe, j’ai demandé ici et là. Tiens j’ai fait un Skype avec cinq personnes
qui veulent bien jouer. On fait ça quand ?”
Rien ne résume aussi bien ma réaction que ça
|
J’ai donc sur les bras cinq joueurs, tous ayant des idées de
perso que je n'ai pas contrôlé, que je ne connais ni d’Eve ni d’Adam et que je ne me sens pas du tout de
faire venir comme ça chez mes parents (oui j’habitais chez mes parents à ce moment-là),
un scénario pas fini et pas du tout le temps que j’aurais voulu pour me
préparer (le temps en question aurait été … très long, je pense que je ne
l’aurais peut-être jamais fait pour être franc, les projets lancés dans le vent
et les idées qui moisissent ça me connait). Panique à bord et montée du rythme
cardiaque. L’écrit aidant, je fais semblant d’être imperturbable, je discute
avec tout le monde et j’essaye de chapeauter le truc. Et ce malgré un qui me
sort qu’il veut jouer “une nonne prostituée à gros seins avec un pistolet à eau
bénite”, “adepte du dieu Plaisir”. Ouais … Plus d’autres gens invités ici et là
sans trop de concertations. Y’a un moment où je me suis demandé si on m’avait
pas fait accoucher d’un monstre sans mon consentement et qu’on allait jamais en
voir le bout. Par quelques astuces persos, notamment faire traîner la rencontre
pour créer les personnages, je me botte le cul pour finir le scénario comme je
peux et je ponds trois kilos de notes personnelles pour ordonner le tout. Et
ensuite arrive le jour fatidique … J’avais les paumes trempées et un gros nœud
dans le ventre, l’impression que j’allais tout foirer et que tout le monde
allait se faire chier. Au final … on y resté quelque chose comme quatre heures
et tout le monde a adoré (je reviendrai là-dessus d’ailleurs) et j’en ai gardé
un souvenir de franche réussite. Mais l’amorce de la chose n’était pas du tout évidente au premier abord.
Atégix :
Je vais répondre en tant que MJ à cette question-là, c'est le domaine le plus approprié pour faire des essais délicats. Pour ma part, dans mon groupe, j'ai déjà dit auparavant que je crée des mondes assez ouverts avec plusieurs scénars au choix. Mais entre les gros scénars, il peut m'arriver de faire ce que j'appelle des "roues libres", autrement dit des moments de temps libre où le groupe peut faire un peu ce qu'il veut dans une certaine zone en attendant la prochaine intrigue. Ça permet 2 choses : montrer que le monde qui les entoure est relativement vivant, et il leur faut bien le temps de souffler entre chaque gros scénar. Une personne normalement constituée ne pourrait pas supporter d'être au cœur des emmerdes h24, donc il faut la laisser respirer...Voyez-y la même chose pour vos persos, et l'effet kiss cool, c'est que ça fait plus de temps pour faire le prochain scénar.
Si j'en parle sereinement aujourd'hui, ce n'était pas du tout le cas la première fois que j'ai tenté ce genre de chose. Étant donné que les PJ font presque ce qu'ils veulent, il vaut mieux le faire en impro et s'adapter en fonction des choses : Les faire découvrir les différents lieux sans trop rentrer dans les détails, donner de la vie aux PNJ et aux environnements sans laisser les PJ complètement spectateurs, proposer des activités diverses, improviser les dialogues sur le moment. C'est un équilibre permanent, et c'est précisément pour cette raison que c'est galère.
D'ailleurs, à la fin de ma première roue libre, mes joueurs m'ont dit à juste titre que je manquais de spontanéité, et que la ville paraissait un peu trop vivante. Lors de la suivante, ça s'est un peu calmé, donc j'imagine qu'à force de répétition j'arriverai à faire un bac à sable plutôt sympa.
De base, j'aime bien les environnements ouverts, mes PJ s'y plaisent également, et corriger les défauts de mes roues libres ne sera qu'une question d'expérience. Preuve en est de l'intérêt que j'y porte, si le groupe avait trouvé ça merdique, j'aurais carrément abandonné cette idée.
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